Les lacs de Batcrabère et de Batbielh. ( P N.)
Les lacs de Batcrabère et de Batbielh.
Les lacs de Batcrabère et celui de Batbielh qui se succèdent en étage, se nichent étroitement dans un désert minéral, entre la crête de la Garenère et l’âpreté des grandes murailles des pics d’Artouste et du Palas, qui tombent en baignant leurs bases dans leurs eaux limpides de ces lacs. Ce monde sévère, austère et minéral appartient aux hordes d’isards qui ont ici trouvé refuge dans ce cadre de haute montagne. Ici, à 2000 m. dans le silence et la solitude, on se sent déjà très haut et infiniment petit dans cette immensité. Pour parcourir l’ensemble de ces lacs, le plus indiqué est de transiter par le refuge de Larribet 2072 m. Le lendemain, franchir la Brèche de la Garenère et suivre le sentier à gauche qui surplombe les petits lacs inférieurs de Batcrabère, qui ne suscitent pas trop d’intérêt. Quitter plus loin le sentier, qui par la droite un cheminement dans les pierres conduit au lac supérieur de batcrabère 2180m. Le mot bat, vat, vall, a pour définition vallée, celui de crabe, crabère se rapporte à la chèvre. Nous sommes donc bien dans la vallée des chèvres ( des isards ).
Sur sa berge, assis sur les rochers, nous contemplons le paysage et nous laissons opérer la magie de ces lieux. Au sud une arête barre l’horizon aux pics déchiquetés : du pic Palas au col Noir, passage obligé pour l’ascension du pic Balaïtous, au port du Lavedan : passage pour rejoindre les lacs et refuge d’Arremoulit. Retour aux lacs inférieurs de Batcrabère 2116 m, où un sentier descend pour rejoindre son extrémité nord, où ses eaux iront en cascades se déverser dans le plateau de Larribet. L’itinéraire passe sur des gros blocs de pierres où en face, sur la falaise, une flèche peinte en rouge tout juste perceptible, nous indique la direction à suivre. Celle-ci nous fait grimper dans un goulet parmi les blocs pour atteindre un cheminement horizontal et semble même évident dans ce paysage tourmenté, hérissé de nombreux pics. Quelques vieilles traces de peintures encore visibles ayant résisté à tous les assauts, nous font bifurquer vers l’ouest pour emprunter un couloir qui grimpe dans un dédale de rochers, laissant sur notre côté de la neige encore présente, pour terminer enfin sur un replat 2400 m. environ. Un cairn sur notre droite nous indique le passage pour l’ascension rapide de la ‘’Dent de Batbielh ‘’ ( vallée vieille ) 2466 m. (non mentionné sur la carte Top 25 ) toute proche, mais que nous ne voyons pas de notre endroit. Petite pause bien méritée. Plein ouest, au bout du chemin, se dresse la crête d’Artouste, avec à gauche son pic d’Artouste 2816m, à proximité un passage très évident : le col de la Lie 2469 m, où s’élance droit dans le ciel la fière pointe du pic de la Lie 2673 m.
On aperçoit très nettement le sentier continuant vers le col de la Lie presque à l’horizontale, pour disparaitre ensuite et descendre sur le lac d’Artouste. Cet itinéraire dans ce paysage minéral qui semble inhospitalier marque la liaison refuge de Larribet / lac d’Artouste et semble adapté aux amateurs de solitude, car pour la troisième fois que je retourne dans ce secteur, je n’ai jamais rencontré âme qui vive. Montée à la Dent de Batbielh 2466 m. Retour sur nos pas pour reprendre le sentier en direction du col de la Lie, afin de descendre dans la caillasse pour rejoindre le lac de Batbielh 2229 m dans son écrin de granit sous les pics de la crête du Courouaou. Ces pics, La Pourgadou et le Courouaou si proche l’un de l’autre et visible depuis Arrens-Marsous, sont surnommés ‘’les oreilles d’âne ‘’ par les habitants du village, par la forme qu’ils possèdent. Nous contournons le lac par sa droite horographique parmi les rochers qu’il faut sauter ou bien enjamber pour rejoindre son extrémité, monter et traverser les blocs pour enfin atteindre son déversoir.
On rencontre un sentier très pentu qui laisse à notre droite les eaux furieuses du lac de Batbielh descendant en longues cascades dans l’immense cahot de gros blocs pour ensuite se déverser dans le ruisseau de Larribet. A proximité, laToue de Larribet 1811 m, toujours aussi insaisissable, se joue du regard. Qui pouvait l’utiliser ? Les pêcheurs montant au lac de Batbielh, les chasseurs d’isards, ou bien les pyrénéistes tentés par l’ascension du Balaïtous, sommet légendaire et de prestige avant la construction du refuge de Larribet ? Le ruisseau de Larribet tranquille, musarde sur le plateau jusqu’au petit lac de la Claou (la clé) 1740 m, puis ira par la grande cascade de Domblas grossir les eaux du gave d’Arrens. Nous allons bientôt entrer dans l’hiver et nous verrons nos montagnes se teinter de blanc et tout là-haut ces lacs s’endormiront sous les premières neiges dans ce paysage étrangement solitaire de la vallée des chèvres.
Georges.